Je contemple à intervalles réguliers les portraits d’enfance de Barthes. Et j’ignore d’où vient cette curiosité plus générale (mais peut-être est-elle parfaitement naturelle et partagée par tous) : celle qui consiste à quémander à mes (plus ou moins) proches des photos d’enfance… Je n’ose pas toujours. Il n’empêche : quand j’aime ou admire quelqu’un me vient immanquablement le besoin de découvrir l’enfant derrière le visage familier. Il ne s’agit pas tant de démasquer l’adulte. Et puis, cette relative nudité ne me semble pas si indécente à demander ; après tout, une photographie d’enfance s’affiche, s’encadre, se donne au regard, presque par définition, même si elle garde une charge relativement indiscrète comme le notait Barthes. Dans son cas à elle, ce fut l’inverse : découvrant tout d’abord ses traits d’enfant sur les photos de son père, je n’ai contemplé le visage de la femme que conséquemment. Et j’ai cherché, durant les premières minutes, à retrouver la petite fille en filigrane. Je me suis alors dit que ce devait être curieux pour elle d’accueillir un étranger qui connaît une part de l’enfant qu’elle a été. Elle, c’est Nicole. Fille d’André Steiner et de Lily Sasson…
– Arnaud Catherine, Ce qu’on n’a pas fini d’aimer, 2011, photographies d’André Steiner, texte additionnel de François Cheval.
En relisant en patientant, saison 2, une chronique de reconfinement par Le Bec en l’air